Ábel dans la forêt profonde, d’Áron Tamási

Áron TamásiPour choisir un livre parmi une multitude, le bibliothécaire a la possibilité de se laisser guider par des impulsions totalement aléatoires : le titre, une œuvre d’un pays lointain ou proche, l’éditeur connu ou inconnu, la quatrième de couverture, la présentation. Il peut également arriver que ces cinq conditions soient réunies pour vous faire craquer… Seule l’immersion dans l’univers de l’auteur pourra justifier ou non votre coup de cœur irréfléchi. C’est ainsi qu’a commencé mon attirance pour le livre d’Áron Tamási, Ábel dans la forêt profonde : un titre magique, un auteur hongrois, une édition genevoise, une présentation sobre et délicate et un texte magnifique sur la quatrième de couverture…

Après quoi je me dis : quelle créature mystérieuse que l’homme ! Le jour, il lutte contre ce qui est, et la nuit il lutte contre ce qui n’est pas. Et lorsque le jour et la nuit passent, ce qui avait existé devient parfaitement identique à ce qui n’avait pas existé. Quelle curieuse créature ! Il a tant d’intelligence, qu’il est capable de fabriquer une arme en acier, comme il est capable d’inventer le diable du néant, mais il ne pourra jamais deviner ce qui arrivera demain, pourtant, il aurait été facile de deviner avant-hier ce qui allait arriver hier.

Forêt du HargitaMes attentes n’ont pas été déçues : la lecture de ce roman fut une gourmandise… Ábel est un adolescent qui se retrouve garde-forestier dans la forêt du Hargita, pour assurer sa subsistance et alléger ainsi la rude existence de ses parents. Dans cette sauvage région de Transylvanie, en 1920, la vie est difficile, mais Ábel est un jeune homme résistant, plein d’humour et de bon sens. Il fait face à toutes les situations avec la curiosité et l’inventivité propres à la jeunesse. Portant sur le monde qui l’entoure un regard précis, parfois empreint de naïveté, ce « Robinson de la forêt » utilise ses erreurs pour progresser dans le chemin de la vie. C’est un philosophe dont nous avons beaucoup à apprendre…

– Ah, si tu pouvais être comme  ça ! soupira mon père.
– Comme qui ?
– Comme un de ces banquiers.
– À d’autres.
– Mais pourquoi ?
– Parce que celui qui s’occupe de l’argent le jour, rêve avec les diables la nuit.

Ce roman initiatique est une œuvre importante de la littérature hongroise. Traduit une première fois en 1944 en Suisse, il se perdit dans les tourmentes de la guerre. Il nous revient aujourd’hui dans une transcription magnifique réalisée par Agnès Járfás. La minorité sicule dont est issu Áron Tamási est passée sous domination roumaine au moment où se déroule l’histoire d’Ábel. L’identité linguistique de ce peuple hongrois très ancien se retrouve aujourd’hui valorisée dans une nouvelle traduction plus proche du texte initial. Agnès Járfás explique son travail dans une note et, après avoir découvert cette œuvre remarquable, on ne peut que saluer la beauté de la langue.

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Alya-Dyn

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